Atelier de Restitution de la Mission d'Examen des Études APS pour la Mise en Place d'un Barrage Réservoir Polyvalent sur le Fleuve Mandrare dans le Cadre du Projet PAAEP

Projet PAAEP : Il s'agit du Projet d'Amélioration de l'Accès à l'Eau Potable, financé par la Banque Mondiale à hauteur de 220 millions de dollars, visant à améliorer l'accès à l'eau potable dans le Grand Antananarivo et dans certaines villes secondaires de Madagascar, tout en améliorant les performances de la JIRAMA. Dans cette optique et dans le but d'améliorer durablement l'accès à l'eau potable et à la nutrition dans le Sud de Madagascar, des études d'Avant-Projet Sommaire sont actuellement en cours. Ces études se penchent sur la faisabilité de l'implantation d'un barrage réservoir sur le fleuve Mandrare à des fins multiples : eau potable, irrigation, hydroélectricité, gestion des crues, pêche, etc.

L'atelier qui s'est tenu le 25 janvier 2024 au Calton a restitué les études d'APS dans le but d'impliquer et de coordonner les parties prenantes pour l'étude et l'éventuelle mise en œuvre du projet. Plus spécifiquement, l'atelier visait à partager les résultats, à s'assurer que toutes les entités gouvernementales disposaient des mêmes informations, à faciliter la création d'un comité interministériel de suivi du projet, et à informer et inviter les bailleurs de fonds à participer à la concrétisation du projet.

Les mots de bienvenue à l'atelier ont été prononcés par Monsieur le représentant de la Banque Mondiale à Madagascar. Il a exprimé son souhait que ce projet soit un « game changer », c'est-à-dire un projet qui changera durablement la donne pour des communautés entières, voire pour le pays. Le barrage ne se limite pas à approvisionner en eau potable, il permettra à l'économie de se développer grâce à l'agriculture et l'élevage, et aux élèves d'aller à l'école par exemple. Pour ce faire et au vu de sa complexité, le projet a besoin d'un travail collectif de la part de toutes les parties prenantes.

L'ouverture officielle de l'atelier a été déclarée par Son Excellence Monsieur le Ministre de l'Eau, de l'Assainissement et de l'Hygiène qui en a profité pour présenter ses meilleurs vœux pour l'année 2024. Il a exprimé sa gratitude envers la Banque Mondiale en félicitant l'analyse méticuleuse et approfondie, l'évaluation économique, et la prise en compte de l'enjeu environnemental. Le projet vise à transformer au mieux la réalité quotidienne de 300 000 citoyens tout en limitant au maximum les impacts sur la biodiversité et le bassin versant. Finalement, Monsieur le Ministre a conclu en soulignant l'importance de la transparence et de la participation active de la population pour assurer un développement inclusif.

Monsieur le Directeur Général de l'Eau au sein du Ministère de l'Eau, de l'Assainissement et de l'Hygiène et deux représentants des bureaux d'études Aqualogus et GERCO qui mènent l'étude, ont présenté le projet et les résultats préliminaires.

Il est à noter que l'étude d'APS prend place sur huit mois, d'octobre 2023 à mai 2024 quand une version finale sera publiée. Ainsi, l'étude présentée lors de cet atelier n'est pas encore finalisée.

Le contexte du Grand Sud a été rappelé : famine, malnutrition, pauvreté. Plus précisément, l'eau dans le Grand Sud est présente mais concentrée dans le temps et mal distribuée dans l'espace. La solution est donc de stocker l'eau pour qu'elle soit présente tout le long de l'année, même lors d'années sujettes aux sécheresses, et de l'acheminer aux zones où elle n'est pas disponible. Ceci peut être fait grâce à un barrage de retenue et à un réseau d'eau.

Ainsi, le projet de barrage pourra contribuer de façon durable à l'amélioration des conditions d'accès à la nourriture, l'eau potable et l'énergie aux populations dans les districts d'Amboasary (Anosy) et d'Ambovombe (Androy) grâce à une retenue sur le fleuve de Mandrare. Il permettra de concrétiser la vision d'une population en bonne santé, alimentairement autosuffisante, vivant en paix et résiliente au changement climatique. De plus, le projet décrit dans l'APS répond aux Objectifs de Développement Durable suivants :

  • ODD n°2 : Faim « Zéro »
  • ODD n°6 : Eau propre et Assainissement
  • ODD n°9 : Industrie, Innovation et Infrastructures
  • ODD n°13 : Résilience au Changement Climatique

Ce barrage mixte (en béton armé et en terre), qui sera le plus grand de Madagascar, sera exploité pour l'hydroélectricité et l'alimentation en eau d'agriculture et potable. Il est estimé que 20 000 hectares de terres agricoles pourront être irriguées et que jusqu'à 500 000 habitants (en prenant en compte la démographie croissante – pour la démographie actuelle : 70 000 bénéficiaires directes et 230 000 bénéficiaires indirectes) bénéficieront d'un approvisionnement en eau potable. La surface de retenue prévue prend en compte les besoins en eau avec un estimatif de 50 litres par jour par habitant et le changement climatique qui se traduira probablement par des épisodes de sécheresses plus importants et plus récurrents.

L'infrastructure prévoit 22 réservoirs de régularisation pour garantir l'approvisionnement gravitaire et l'irrigation ainsi qu'un réseau d'approvisionnement en eau secondaire de plus de 2000 kilomètres de long destiné à alimenter des blocs dédiés à l'irrigation. L'approvisionnement en eau potable se fera directement par des prises d'eau au niveau des tuyaux pour les villages se situant le long du réseau et grâce à des réservoirs situés au niveau des villages plus grands et des petites villes telles qu'Ambovombe et Amboasary. Des stations de traitement d'eau pourraient être prévues selon les résultats de qualité de l'eau.

Les autres bénéfices incluent l'atténuation des inondations et la facilitation des petits jardins maraîchers. De manière générale, en ne générant pas d'émissions carbone et en permettant l'accès à des services essentiels et de l'énergie verte, le barrage renforcera la résilience de la population dans les régions Anosy et Androy.

Néanmoins, il est important de noter que le barrage créera une surface de retenue de 66 km². En d'autres termes, 66 000 hectares de terres seront engloutis par l'eau. Ainsi, 5 000 habitants perdront leur lieu de vie, un chef-lieu et ses infrastructures seront engloutis, 1 300 maisons et 6 000 tombeaux disparaîtront, 400 hectares de champs de culture seront sous l'eau, et l'habitat naturel de milliers d'espèces de flore et de faune, dont certaines en danger selon l'Union internationale pour la Conservation de la Nature, sera détruit. Le bureau d'études GERCO recherche des solutions pour atténuer les impacts sociaux et environnementaux.

Finalement, certaines menaces à la viabilité et à la pérennité du projet ont été soulevées : banditisme, « Tiomena » (le vent du sud qui déplace du sable et pourrait impacter les réservoirs à ciel ouvert), sédimentation et érosion.

Le projet décrit dans l'APS inclut deux phases :

  • La 1ère phase du projet : réalisation du barrage et de l'usine d'hydroélectricité, construction de la ligne de conduite principale, approvisionnement en eau potable de trois villages. Le coût estimatif de la 1ère phase du projet est de 500 millions de dollars américains.
  • La 2nd phase du projet : expansion, approvisionnement en eau potable de tous les petits villages qui longent le réseau et identification de nouveaux périmètres à irriguer.

L'atelier a été clôturé par Son Excellence Monsieur le Ministre de l'Eau, de l'Assainissement et de l'Hygiène qui a rappelé le besoin de collaboration entre toutes les parties prenantes et la nécessité d'adopter une approche intégrée et holistique, notamment pour atténuer les impacts sociaux et environnementaux, et faire face aux menaces mentionnées. Monsieur le Ministre a remercié les participants dont la présence et les échanges réaffirment l'engagement pour garantir l'eau potable à la population malagasy.